samedi 7 septembre 2013

Un emploi sauvé par un groupement d'employeurs...et l'ordre des experts comptables concurrencé


Franck Delalande (à gauche) a mis à profit sa connaissance des besoins des entreprises pour proposer à Marie-Lise Le Bot de travailler deux jours chez Seti (Denis Bernhard, 2e à gauche) en conservant trois jours chez Plasmor. Elle travaille depuis 18 ans avec Dominique Bourçois.

Un petit miracle dans cette conjoncture économique difficile ? Surtout une intervention concertée et anticipée entre le fabricant de kayak de Theix, qui ne pouvait plus lui garantir un temps plein, la société Seti, une petite société vannetaise qui cherchait une comptable, et le groupement d'employeurs Vénétis (1).

Fin 2012, en pleine pétole, avec un chiffre d'affaires en baisse, Dominique Bourçois, PDG de Plasmor, se voit dans l'obligation de « resserrer ses charges de personnel ». Le poste de comptable est notamment menacé : « je n'avais plus les moyens de payer un temps plein. » Le patron informe sa salariée d'une situation qu'elle ne découvre pas vraiment. « J'étais bien placée pour voir passer les chiffres, témoigne Marie-Lise Le Bot, par contre je souhaitais conserver un temps plein. »

Un rassurant CDI

Le chef d'entreprise, adhérent de longue date du groupement d'employeurs, alerte le directeur de Vénétis, Franck Delalande. Rapidement, ce dernier fait entrer la société Séti (Société d'équipement et de tests industriels à Kerniol) dans la boucle. « Notre comptable, qui travaillait à temps partagé entre Seti et Isatech, m'avait informé qu'Isatech lui proposait un temps plein qu'elle souhaitait prendre », précise le PDG de Seti, Denis Bernhard.

De deux temps partiels, Vénétis a fait un temps plein et embauché Marie-Lise Le Bot en CDI. « On sait bien que le CDI sécurise le salarié, observe Franck Delalande, d'ailleurs, sur nos 140 salariés, il n'y a que ça. » Mais pour les trois employeurs, l'exemplarité de ce cas unique dans les annales du groupement va au-delà de la sauvegarde de cet emploi.

Pour Franck Delalande, « la solidarité entre employeurs est possible. Elle permet de maintenir la compétence au sein de l'entreprise en difficulté, tout en en faisant bénéficier une autre. L'emploi évolue sans disparaître. »

Une réponse à la flexibilité

Dominique Bourçois dit avoir redéfini le poste de sa comptable « pour ne l'utiliser que dans sa compétence forte. Cet effort d'organisation est payant et permet de conserver une relation de confiance avec le salarié, qui ne subit pas un temps partiel non désiré. »

Denis Bernhard, lui, a trouvé une employée « à temps partiel, pour un poste que j'aurais sans doute eu du mal à pourvoir ou avec une personne qui ne serait pas restée... C'est de cette souplesse dont nos petites entreprises ont besoin », assure le PDG de Plasmor.

Franck Delalande y voit un élément de réponse à la fameuse flexi-sécurité : flexibilité pour l'employeur, sécurité pour le salarié. Marie-Lise Le Bot passe deux jours chez Seti, trois jours chez Plasmor. Et ne se plaint pas de son sort.

Et une une situation qui concurrence illégalement  l'ordre des experts comptables...

Ce partage d'emploi est certes un excellente idée en matière d'emploi mais il contrevient hélas radicalement au monopole des expert comptables qui ont déjà fait condamner le Président d'un groupement d'Employeurs en 2004 (Cour de cassation, chambre criminelle  - Audience publique du mercredi 19 mai 2004 ) qui partageait un comptable entre plusieurs adhérents :

"Commet ainsi le délit d'exercice illégal de cette profession le président d'un tel groupement qui met à la disposition de ses adhérents des salariés effectuant....des travaux de comptabilité facturés sur la base d'un tarif horaire, sans que ces employés soient liés à chaque adhérent par un contrat de travail.»


Une bonne initiative, donc...mais pas au goût de tous ! Ainsi va la complexité du système français.

Le GE ARKOSE témoigne de sa situation avec l'Ordre des Experts Comptables:

Bonjour, 

Nous sommes un GE qui embauche principalement des comptables pour les mettre à disposition de ses adhérents. Situés dans le Puy de Dôme, nous avons été sommés d'arrêter notre activité par l'Ordre des Experts Comptables d'Auvergne, au 30/09/2012. Notre avocat a souligné que nous ne facturions pas des travaux de comptabilité, mais de la mise à disposition de personnel. Il a aussi précisé notre organisation : lieu de travail partagé entre le siège de l'employeur et le domicile des salariées - télétravail-; certains de nos adhérents ont aussi un expert comptable, ou un commissaire aux comptes (associations).Nous n'avons reçu aucune réponse de l'Ordre à notre lettre de septembre 2012, et notre GE (Arkose) est toujours en activité. Nous avons 75 adhérents (TPE) et venons d'embaucher une 4ème salariée. En outre, nous recevons de nombreuses demandes d'adhésion. Nous avons sensibilisé 2 de nos députés à ce problème, afin d'avoir un soutien politique en cas de gros souci, mais aussi parce que nous aimerions voir arriver une réelle législation là dessus.


GE Arkose
N Pialoux






5 commentaires:

  1. Bonsoir,

    Il me semble que l'arrêt portait sur un groupement d'employeurs organisé "comme un cabinet comptable" c'est à dire qui effectuait dans ses locaux ce qui normalement doit être effectué sous le contrôle de l'employeur. Ici, il me semble que les tâches sont effectuées chez les différents employeurs mais effectivement sans que l'employée soit liée à chaque adhérent. La limite me semble très floue.
    Patricia

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  2. La position de l'ordre des experts comptables n'est pas limitée aux attendus de cet arrêt de 2004.

    Pour eux, et pour la jurisprudence constante en la matière, la comptabilité d'une société ne peut être faite que par des salariés qui sont liées à cette société par un contrat de travail et le cas de la mise à disposition par un groupement d'employeur n'en fait pas partie.

    Il y a d'autres jurisprudences concernant l'exercice illégal de la comptabilité par du personnel mis à disposition par des groupements d'employeurs.

    Cette situation est connue depuis fort longtemps.

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  3. Dans le cadre d'un poste administratif, le personnel en MAD peut effectuer des travaux comptables, sous la double supervision de l'adhérent et de l'expert comptable de celui-ci. C'est ce dernier qui controle et valide dans ce cas les comptes.

    Que l'ordre des experts comptables se batte pour constituer un monopole de fait, notamment auprès des TPE et des petites PME, est une chose. Que l'on l'accepte en est une autre. Ce qui est indispensable: l'expert comptable de l'adhérent pour boucler l'exercice et les déclarations.

    Votre interprétation est trop stricte. Le CRGE POITOU CHARENTES sait mieux expliquer les contraintes et les formes à respecter.

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  4. Bonjour,
    Nous sommes un GE qui embauche principalement des comptables pour les mettre à disposition de ses adhérents. Situés dans le Puy de Dôme, nous avons été sommés d'arrêter notre activité par l'Ordre des Experts Comptables d'Auvergne, au 30/09/2012. Notre avocat a souligné que nous ne facturions par des travaux de comptabilité, mais de la mise à disposition de personnel. Il a aussi précisé notre organisation : lieu de travail partagé entre le siège de l'employeur et le domicile des salariées - télétravail-; certains de nos adhérents ont aussi un expert comptable, ou un commissaire aux comptes (associations).Nous n'avons reçu aucune réponse de l'Ordre à notre lettre de septembre 2012, et notre GE (Arkose) est toujours en activité. Nous avons 75 adhérents (TPE) et venons d'embaucher une 4ème salariée. En outre, nous recevons de nombreuses demandes d'adhésion. Nous avons sensibilisé 2 de nos députés à ce problème, afin d'avoir un soutien politique en cas de gros souci, mais aussi parce que nous aimerions voir arriver une réelle législation là dessus.
    GE Arkose
    N Pialoux

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  5. Bonjour,
    Du nouveau concernant cette situation ?

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