Le site Internet de Pôle Emploi ne constitue déjà plus la seule ressource des personnes qui cherchent un travail. Mais demain, Google pourrait jouer un rôle incontournable. En imposant un langage commun aux acteurs de ce secteur
Apres la recherche sur Internet, la mobilité, avec ses Google Car, ou encore
la santé, Google s'attaquerait-il au marché du travail ? Avec ses nouveaux projets, le géant américain de l'Internet pourrait remettre en cause le rôle central, déjà très contesté, de l'opérateur public, Pôle Emploi,
dans l'organisation de ce marché si particulier, sur Internet. Telle est la
conclusion de l'étude « Google et le marché
numérique du travail » édité dans "Connaissance
de /'emploi" (numéro 136), publiée par le CEET, Centre d'Etudes
de l'Emploi et du Travail, en mai dernier.
A la base,
rappelle l'étude, Google,
comme principale porte d'entrée sur
le Web,
a déjà indirectement
contribué à structurer
le marché
du travail en ligne. En effet, ses algorithmes de
classement et son programme d'achat de mots clés déterminent le référencement
des sites d'emploi qui aqreqent les offres, comme lndeed.fr ou Regionsjob. com.
Depuis le début des années 2000, ces sites jouent le rôle de moteurs de
recherche de l'emploi: ils indexent les annonces publiées sur le Web, offrant
aux candidats la possibilité d'effectuer leurs recherches depuis un point
unique. Mais la situation quasi monopolistique de Google leur impose de
s'adapter aux algorithmes de classement du moteur de recherche, sous peine de disparaître des radars des internautes ... Déjà, la multiplication de ces sites Internet a bouleversé la mission de Póle Emploi, qui, depuis 2013, met en oeuvre un dispositif d'agrégation des offres d'emploi de diverses provenances.
Toutefois, pour l'instant, la tâche des agrégateurs, privés ou publics, se
heurte a une difficulté majeure :
l'absence d'un langage partagé pour décrire les offres. Concrètement, il
n'existe pas de lexique commun pour décrire les emplois ou les compétences. Et
Póle Emploi ne parvient pas a imposer
le sien, le code Rome, nomenclature des métiers et compétences.
Parlez-vous Google?
C'est précisément cet obstacle que s'emploie a lever Google. Sa nouvelle application, dévoilée fin
2016, propose un langage commun aux acteurs de la recherche d'emploi. Le
dispositif fait actuellement l'objet d'un test fermé auprès de grandes entreprises et d'acteurs du marché numérique du travail. L'idée : créer une sorte de
dictionnaire comportant 250 000 intitulés d'emplois et 50 000 catégories décrivant des compétences. A titre de comparaison, le code Rome de Pôle emploi compte 11
000 intitulés d'emplois. Lesquels devraient se retrouver dans le dictionnaire
Google, qui vise a englober !'ensemble des
nomenclatures déjà réalisées
par les autres acteurs, publics et privés.
Paradoxe, « alors même que sa construction s'appuie sur des données
publiques, le dispositif du moteur de recherche relève d'un modèle propriétaire
et il n'est pas envisagé, pour le moment, de le rendre open source ", relèvent les chercheurs du CEET.
Par ailleurs, si Google a abandonné un projet de site Internet d'offres
d'emploi classique, l'entreprise est en train de tester un autre service, qui
propose aux entreprises des fonctionnalités de gestion de leurs recrutements en
ligne. Bref, c'est bien une stratégie globale que semble viser le géant de
!'Internet. Et si elle aboutit, son initiative de créer une langue commune
pourrait bousculer l'activité des multidiffuseurs d'offres d'emploi, qui
permettent aux recruteurs d'envoyer leurs annonces vers différents sites
d'emploi depuis une interface unique, ainsi que celle des sites Internet qui agrègent les offres d'emploi.
Mais au-delá, « c'est le rôle de l'action publique dans la régulation et la mise en forme des
marchés numériques du travail qui est interrogé. Un outil de coordination. accessible a tous et facilitant la circulation de l'information,
peut en effet être considéré
comme un bien public. En France, le Rome de Pole emploi pourrait remplir ce rôle. Disponible
depuis 2075 en open data, il n'a pas fait l'objet d'une adoption massive, mais
il est désormais possible pour Google, ou tout autre acteur, de l'intégrer a un méta-investissement de forme destiné à élaborer une 'lingua franca' commune aux marchés du
travail francophones. Pour autant, s'il s'agit d'un équipement d’intérêt général, la construction d'un te/ outil et sa mise a disposition des acteurs pourrait relever des
missions du service publíc de l'emploi », plaide le CEET.
Conclusion de l'étude, si le fait que Rome soit disponible en open data va
dans ce sens, pour aller au bout du processus, il serait nécessaire d'élargir
ce dispositif pour le rendre universel, en y intégrant d'autres référentiels,
ou en offrant aux autres acteurs la possibilité d'y contribuer directement
via, l'ouverture régulée de droits en écriture. Cette évolution ou Google ... •
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