jeudi 22 mars 2012

Nouveau volet judiciaire pour le GEIQ BTP 83


La Marseillaise - AGNES MASSEI


« La convention [entre le GEIQ et la DIRECCTE, ndlr] suppose une obligation de résultat. S’il n’y a pas d’issue positive en termes de retour à l’emploi, le GEIQ ne peut prétendre à ces aides », indique Jean-Louis Horon (CGT).
Deux anciennes salariées et la CGT dénoncent des « irrégularités » dans l’utilisation de fonds publics destinés à l’emploi de publics en difficulté.
« Insertion professionnelle, formation, emploi, aides publiques, atteintes à l’encontre de salariées ayant voulu exercer leurs droits au sein de l’entreprise… Il s’agit là d’un dossier qui balaie toutes ces questions d’actualité. » Ainsi que l’indique Jean-Louis Horon, pour l’Union départementale CGT, le dossier en question est pour le moins épais.

Il concerne un groupement d’employeurs du BTP (bâtiment et travaux publics, ndlr) – comme il en existe de nombreux en France –, en l’occurrence le GEIQ BTP 83, dont la vocation est de mettre en relation des jeunes de 16 à 25 ans en insertion avec des entreprises, en vue de déboucher sur des emplois pérennes. Une action qui bénéficie d’une manne financière non négligeable à travers l’octroi de subventions de la DIRECCTE (Direction du Travail) et du Conseil Régional. Le principe est simple : chaque année le GEIQ s’engage à remettre un certain nombre de jeunes dans le circuit professionnel et touche, pour chacun d’entre eux, une somme d’argent. Le tout faisant l’objet d’une convention dans laquelle toutes les parties s’engagent.
Sur la foi de déclarations, selon lesquelles de nombreux jeunes auraient retrouvé un emploi, le GEIQ BTP 83 se voit donc remettre des dizaines de milliers d’euros chaque année.
Jusqu’au jour où deux salariées, amenées à assumer des responsabilités qui ne sont pas les leurs au cours d’une vacance de direction, s’aperçoivent que les fameuses déclarations transmises aux services de la DIRECCTE et de la Région ne sont pas en conformité avec la réalité. Elles expriment leur désaccord avec ce genre de pratique et le couperet ne tarde pas à tomber. Elles sont licenciées quelques semaines plus tard. Elles prennent alors contact avec la CGT qui, outre la défense des salariées, entreprend de creuser l’affaire.


Une affaire émaillée, selon Jean-Louis Horon, d’« irrégularités ». « Lorsque nous avons commencé à regarder les choses d’un peu plus près, nous avons constaté que le GEIQ avait déclaré 45 contrats en 2009 et 45 en 2010. Or, en vérifiant quels étaient les stagiaires ayant effectivement retrouvé un emploi, nous nous sommes aperçus qu’il y en avait 2 en 2009 et un seul en 2010 », déclare le responsable syndical. Un léger différentiel en effet. L’argent, lui, a en revanche été perçu. 700 euros émanant de la DIRECCTE pour chaque contrat, auxquels il faut ajouter les 1500 euros de la Région selon le même principe. Ce qui, insiste la CGT, représente tout de même une modique somme de l’ordre de… 150 000 euros. « La convention suppose une obligation de résultat. S’il n’y a pas d’issue positive en termes de retour à l’emploi, le GEIQ ne peut prétendre à ces aides », précise Jean-Louis Horon. La CGT n’a naturellement pas manqué d’informer les financeurs. La Région a pris plusieurs dispositions. La réponse de la DIRECCTE se veut plus laconique. Dans un courrier datant du 10 décembre, elle informe l’organisation syndicale que son « unité territoriale a connaissance des difficultés actuelles que rencontre cette structure et gère la situation, en étant très vigilante sur l’utilisation des fonds publics ». Le préfet a également été averti.
La décision du Comité national de coordination des GEIQ semble en dire un peu plus long sur la situation. Cette instance a en effet retiré son label en décembre 2010 à la suite de « la visite effectuée par sa secrétaire générale dans les locaux de Toulon le 23 novembre 2010 » et au regard « des anomalies importantes » qui y ont été observées.
On imagine aisément que ni les deux salariées ni la CGT ne comptent en rester là. Les premières, privées de toute ressource depuis novembre, ont saisi les Prud’hommes. Quant à la CGT, elle s’apprête à informer le procureur et déposer plainte. Ce qui devrait être fait dès cette semaine.

Note CR : Le GEIQ BTP a fait l'objet d'une décision de liquidation judiciaire prononcée par le Tribunal de Grande Instance de Toulon le 8 mars 2012 soit plus d'un an après l'arrêt d'activité de GEIQ BTP 83, fin 2010. Cette décision tardive résulte du fait qu'en 2011 le TGI avait jugé que la liquidation n’était pas nécessaire du fait du régime de la solidarité financière. La Cour d'Appel à infirmé cette décision et le dossier est revenu devant le TGI de Toulon qui a prononcé enfin la liquidation.
Cette décision était très attendue par les 4 salariés permanents qui ont été licenciés pour des motifs non économiques tous contestés devant le Conseil des Prud'hommes. De même, environ 50 salariés mis à disposition n'ont pas eu leurs congés payés, non versés par le GEIQ à la caisse des congés du BTP.
L'assurance garantie des salaries (AGS) va donc pouvoir enfin payer toutes ces dettes salariales qui s'ajouteront au passif du GEIQ estimé à environ 350 000 euros.
Me Laure Simon, qui est le liquidateur nommé dans ce dossier aura ensuite pour mission de réclamer le passif entrant dans le champs de la responsabilité solidaire auprès de la quarantaine d'entreprises adhérentes du GEIQ.
Une mauvaise nouvelle pour bon nombre d'entreprises du BTP du département et en particulier pour le trésorier du GEIQ qui a depuis été élu Président de la fédération départementale du BTP.
Le procureur de la République, présent à l’audience du 8 mars dernier a pris la parole pour déclarer qu'il y avait dans cette affaire "un vaste détournement de fonds publics sur plusieurs années".
Le volet pénal de l'affaire suit son cours et l'ancien directeur du GEIQ a été mis en examen.

2 commentaires:

  1. "Retrait du label en fin d'année 2010".
    Et il faudrait se féliciter du travail de contrôle du CNCE GEIQ qui a labellisé ce groupement d'employeurs en 2009 et 2010, et cela après une enquête approfondie (ceux qui la remplisse annuellement savent de quoi il retourne) !
    Et dire que cette labellisation est sensée garantir le caractère "socialement responsable" de la structure auprès des financeurs et autres donneurs d'ordres publiques ou privés...

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  2. Bonjour Monsieur Ruellan,
    Vous ne rendez pas service aux GEIQ en publiant cet article ! Vous êtes pourtant vous même président d'un GEIQ...
    Fidèle lectrice de votre blog je dois néanmoins reconnaître que vous ne prenez jamais partie pour une forme de groupement particulière ou pour une structure les représentants et que vos informations sont toujours pertinentes, intéressantes et bien documentées.

    Tous les réseaux de groupements ont leurs brebis galeuses et les GEIQ n'y échappent hélas pas...

    Cela ne remet pas en cause la pertinence des GEIQ mais cela m'interpelle sur notre procédure de labellisation qui doit certainement être améliorée ou même confiée à une autre organisme que le CNCE GEIQ pour plus d'impartialité.
    Merci de continuer votre Blog qui est devenu un référence. Ne changez rien !

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