jeudi 24 octobre 2013

La réforme sur la formation professionnelle franchit une étape


Jean-Marie Luttringer, juriste spécialisé dans le droit de la formation professionnelle est revenu le 23/10/2013, lors de la journée des GEIQ organisée à Paris à la Fédération du BTP sur l'avancement de la réforme de la formation professionnelle.


Les contours se dessinent peu à peu et nous en sommes à la 3ème réunion de négociation paritaire nationale inter-professionnelle.

Les plus grands changements sont à attendre sur le plan de formation et le DIF avec la très probable mise en oeuvre du compte personnel de formation.

Il y a par contre peu de changements en vue sur le CIF ou la professionnalisation dont le système mutualisé convient bien à l'ensemble des partenaires sociaux.

Un groupe travail sur l'apprentissage et les contrats de professionnalisation est constitué mais à ce jour on ne sait pas encore si des modifications sur ces contrats ou leur financement sont à attendre

Pour être plus précis, je reproduis ci-après un article de François Béharel, Président du Groupe Randstad France, paru le 22/10/2013 dans les Echos.

L'affaire est entendue. La formation professionnelle est opaque, inefficace et inégalitaire. Et coûte cher par-dessus le marché. Près de 32 milliards d'euros chaque année. En cause, une multitude d'acteurs dont le partage des compétences manque de clarté. Mais aussi un système sur administré, qui décourage plus d'une PME d'engager la montée en compétences de ses salariés.
Ce constat, nul ne le conteste. Et certainement pas le gouvernement, qui a appelé les partenaires sociaux à réformer « en profondeur » la formation professionnelle. Deux axes structurants devraient guider cette réforme. La suppression de la taxe payée par les entreprises et l'introduction d'un compte personnel de formation (CPF).
La taxe, d'abord. Payée par les entreprises à concurrence de 1,6 % de leur masse salariale, elle assure la moitié ou presque des ressources de la formation continue - environ 13 milliards d'euros. Les entreprises n'ont d'autre choix que de la payer sans pour autant être soumises à une quelconque obligation de formation - exception faite de l'adaptation au poste. Cette incohérence est vue comme le péché originel à l'origine des insuffisances de la formation professionnelle.
Aux yeux du gouvernement, supprimer cette taxe aux effets réputés punitifs et désincitatifs ne mettrait pas la formation professionnelle en danger, puisque les entreprises consacrent déjà 2,9 % de leur masse salariale en moyenne à la formation - près de deux fois plus que l'obligation légale. En réalité, cette mesure n'impacterait qu'un seul des trois dispositifs financés par la taxe. Sur 1,6 % payé par les entreprises, 0,2 % sert à financer le congé individuel de formation, le CIF. Ce dispositif permet souvent de donner un nouvel élan à sa carrière. Le gouvernement n'aurait donc aucune raison de s'en séparer. Il en va de même pour le 0,5 % versé par les entreprises pour financer la professionnalisation. Cette forme d'alternance vise notamment les jeunes et les demandeurs d'emploi. Elle affiche des résultats concluants en matière d'insertion professionnelle. Inutile donc de la remettre en question.
Reste le 0,9 % du plan de formation (PDF). Selon toute vraisemblance, le gouvernement s'apprêterait à renoncer à la taxe qui le finance. Ce montage serait particulièrement habile. Dans la mesure où les formations attachées au plan découlent du droit du travail, les entreprises devraient continuer de s'y conformer. Taxe ou pas, cela ne change donc pas grand-chose. A un détail près : la création du compte personnel de formation ; l'autre grande nouveauté de la réforme à venir. En instaurant la portabilité des droits relatifs à la formation professionnelle, ce dispositif donnerait corps à l'idée selon laquelle les droits doivent être attachés non au contrat de travail mais à la personne. On assisterait là à une sécurisation en bonne et due forme des parcours professionnels pour le plus grand nombre, y compris les personnes souvent lésées par l'architecture actuelle de notre formation continue, à commencer par les salariés des PME. Pour ces raisons, notre pays ne doit pas rater le rendez-vous du compte personnel de formation (CPF).
A cet égard, il me semble que son succès est suspendu à deux conditions au moins. D'abord, pour être efficace, il devra garantir un couple très étroit entre formation et emploi. Cela suppose de restreindre son usage aux métiers en tension et en évolution.
La deuxième exigence est celle du prix à payer. Les entreprises cofinanceront ce compte. Comment ? En instaurant une « chasse au gaspi », puisque tout le monde s'accorde à dire que, sur les 32 milliards d'euros que la nation consacre chaque année à la formation professionnelle, une grande partie est mal utilisée. Cette mauvaise gestion recèle des gisements d'économies qu'il nous faut avoir le courage d'exploiter.

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