Par Gwénaëlle Poilpot-Rocaboy.Professeur à l'université de Bretagne Sud, et Anne Joyeau. Maître de Conférences à l'IGR-IAE de l'Université de Rennes (origine Ouest France)
Même en cette période de chômage élevé, des pénuries d'effectifs et de compétences persistent sur le territoire. Trois raisons peuvent expliquer ce paradoxe. La première résulte d'un besoin de compétences rares sur le marché du travail. L'évolution technologique se heurtant souvent à l'insuffisance de formations proposées, l'écart se creuse entre les besoins des entreprises et les compétences réelles des salarié(e) s. La seconde raison est liée à la persistance de stéréotypes qui limitent le « champ des possibles » en matière de recrutement, excluant des compétences du seul fait de l'âge, du genre, de l'origine, du handicap... des candidat(e) s à l'embauche. Une troisième raison est liée aux besoins de temps de travail spécifiques des entreprises (saisonnier, fragmenté, partiel...) qui ne leur permettent pas de proposer un contrat à durée indéterminée à temps plein, garant de la satisfaction d'un besoin humain fondamental : la sécurité.
Pourquoi ne pas former les demandeurs d'emploi à ces métiers « pénuriques » ? Ne peut-on pas en améliorer l'attractivité ? Mettre autour d'une même table des patrons et leurs responsables ressources humaines, les spécialistes de l'emploi, les organismes publics de formation, etc., pour rechercher des solutions... Bref, « travailler à la formation en réseaux » et au développement d'une gestion territoriale des emplois et des compétences, devenue une nécessité dans le contexte actuel.
Osons recruter autrement ! Évitons le « clonage » dans les entreprises et concentrons-nous sur l'essentiel : l'adéquation entre le besoin en termes de savoir, de savoir-faire et de savoir être et les compétences des candidat(e) s. Des réseaux existent pour aider à intégrer dans les entreprises des personnes en situation de handicap (Agefiph, etc.), issues de l'immigration (Face), des femmes dans « des métiers d'hommes » (CIDFF, Entreprendre au féminin etc.).
Il reste encore une difficulté : beaucoup d'entreprises doivent répondre à des besoins flexibles, relevant de compétences ponctuelles sur un temps limité (quelques mois par an ou deux jours par semaine, par exemple). La mutualisation des compétences via un groupement d'employeurs (GE) est alors une innovation réelle pour répondre conjointement au besoin de flexibilité de l'entreprise et au besoin de sécurité du salarié. Institué par la loi du 25 janvier 1985, il permet aux PME-PMI d'un même territoire de se regrouper en réseaux et d'employer ainsi ensemble une main-d'oeuvre qu'elles n'auraient pas les moyens de recruter seules.
Cette configuration inter-organisationnelle spécifique génère une forme d'emploi inédite : le travail à temps partagé. Les entreprises adhérentes au groupement se partagent des compétences répondant à leur besoin réel. L'analyse de quelques sites de GE dans la région témoigne de la nature très large des emplois à temps partagé allant du poste d'opérateur (production, logistique...) au poste de cadre (responsable des ressources humaines, contrôleur de gestion, webmaster...).
Des solutions existent donc ! Seule la capacité des acteurs à coopérer au sein d'un territoire permettra à tous de répondre aux exigences de ce siècle.
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