L'an passé, 286.025 travailleurs détachés ont été déclarés à l'administration française, selon des données provisoires transmises à la Commission nationale de lutte contre le travail illégal (CNLTI) qui seront présentées ce lundi à Matignon.
Plombier polonais, maçon portugais... Le recours au travail détaché en France semble s'est accru. En 2015, 286.025 travailleurs détachés ont été déclarés à l'administration française. Cela représente une progression de 25% par rapport à l'année précédente, selon des données transmises à la Commission nationale de lutte contre le travail illégal (CNLTI). Les membres de cette Commission doivent se réunir, ce lundi, à Matignon pour la présentation d'un plan national pour la période 2016-2018.
Dans le détail, le temps de travail effectif des travailleurs détachés a aussi fortement augmenté (+11%), pour atteindre 10,7 millions de jours, soit plus de 46.500 équivalents temps-plein. La Pologne est le principal pays d'origine des salariés détachés en France, avec 46.816 travailleurs. Suivent le Portugal (44.456), l'Espagne (35.231) et la Roumanie (30.594). Le bâtiment-travaux publics (BTP) reste le premier secteur concerné avec 27% des déclarations, même si sa part diminue, devant l'intérim et l'industrie.
Grand défenseur du patriotisme économique, l'ex-ministre Arnaud Montebourg a fustigé ce matin, au micro de RTL, une situation qui «n'est plus acceptable». Il souhaite remplacer les travailleurs détachés «par des salariés locaux qu'il faut former», estimant qu' «il y a un travail considérable à faire là-dessus. Il y a 300.000 personnes aujourd'hui qui viennent de leur pays d'origine pendant six mois et qui sont dans tous les marchés de BTP, de transport, de logistique. Comment a-t-on pu laisser s'installer ça quand on a plusieurs millions de chômeurs?»
En dix ans, le nombre de travailleurs détaché a ainsi décuplé. Cela signifie-t-il pour autant que le nombre de travailleurs détachés en France s'accroît? Selon le gouvernement, cette hausse est «probablement» due aux «contrôles de plus en plus fréquents» et aux «sanctions nouvelles», qui ont poussé certains employeurs à déclarer des «détachements précédemment non déclarés».
Depuis l'été 2015, l'inspection du travail a intensifié ses contrôles, passant de 600 interventions en juin 2015 à 1.504 en mars 2016. Trois quarts ont été effectuées dans le BTP. Et entre juillet 2015 et mars 2016, l'administration a prononcé 291 amendes pour un montant de 1,49 million d'euros, concernant 1382 salariés détachés. Selon un rapport sénatorial de 2013, la fraude concernerait entre 220.000 et 300.000 travailleurs détachés illégalement.
Encadré par une directive européenne de 1996, le détachement permet à une entreprise européenne d'envoyer temporairement ses salariés en mission dans d'autres pays de l'UE, en n'appliquant que le noyau dur de sa réglementation (Smic, conditions de travail) tout en continuant de payer les cotisations sociales dans le pays d'origine.
Les travailleurs détachés en France sont aussi ... français
Employés par des agences d'intérim luxembourgeoises ou belges, ces travailleurs sont ensuite détachés en France. Un moyen, pour les entreprises françaises qui les emploient, d'obtenir une main d'oeuvre qualifiée, moins chère.
Plombier polonais, maçon portugais... Le travailleur détaché en France est également français. Comment expliquer ce paradoxe? Plusieurs agences d'intérim luxembourgeoises et belges, recrutent en effet des travailleurs français. Ces derniers sont ensuite chargés d'une mission en France, pour le compte d'une entreprise hexagonale. Ils deviennent ainsi des travailleurs détachés. Un système parfaitement légal. Au total, 18.000 travailleurs français seraient détachés en France, selon un rapport parlementaire réalisé en 2013.
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