L'ordonnance du 2 avril 2015 sécurise le portage salarial.
A mi-chemin entre l'indépendance et le salariat, le portage salarial est une relation contractuelle tripartite, dans laquelle un collaborateur porté, ayant un contrat de travail avec une entreprise de portage salarial, effectue une prestation pour le compte d'entreprises clientes. Il est particulièrement adapté aux activités de conseil et d'ingénierie.
C'est une nouvelle forme d'emploi, fruit d'un compromis entre les besoins du monde économique et les règles du droit social, qui vient répondre à un besoin social en permettant le retour à l'emploi de certaines catégories de demandeurs d'emploi, notamment seniors. Après de nombreuses années de pratique dans un grand vide juridique, le portage salarial a bénéficié depuis quelques temps d'avancées sensibles et contradictoires.
Son exercice continuait à soulever grand nombre de questions et d'incertitudes, telles que:
- qui peut devenir collaborateur porté ?
- quelle société peut faire du portage salarial ?
Depuis une récente jurisprudence de la cour de cassation du 4 février 2015 étant venue appliquer à la relation de portage salarial le principe selon lequel la conclusion d'un contrat de travail emportait pour l'employeur obligation de fournir du travail à son collaborateur, on pouvait également se demander si la société de portage salarial était contrainte de fournir un travail à son collaborateur et de lui verser une rémunération au titre des périodes sans prestation.
Il manquait au portage salarial une base juridique autre que sa définition légale. C'est désormais chose faite avec l'ordonnance du 2 avril 2015 et la récente Loi Travail.
Nous savons désormais qu'une société de portage doit:
- exercer de manière exclusive l'activité de portage salarial,
- avoir effectué une déclaration préalable d'activité auprès de l'administration, dont les modalités seront fixées par un décret à venir,
- accepter uniquement des missions de services (expertise dans des domaines tels que la communication, la finance, les ressources humaines...).
L'embauche peut se faire dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée ou d'un contrat à durée indéterminée
Dès lors que les conditions légales encadrant les opérations de portage salarial sont respectées, les dispositions relatives au marchandage et au prêt de main-d'œuvre illicite ne sont pas applicables. Désormais, le collaborateur porté peut être toute personne justifiant d'un niveau d'expertise, de qualification et d'autonomie suffisant pour rechercher ses clients. Il est rémunéré par l'entreprise de portage, tout en étant autonome dans l'organisation de sa mission. Il appartient au collaborateur porté de rechercher ses clients et l'entreprise de portage n'est pas tenue de fournir du travail au collaborateur porté.
Dans sa relation avec le collaborateur porté, outre la rédaction de contrat(s) et la transmission mensuelle d'un compte d'activité, la société de portage doit:
- contrôler l'activité du collaborateur porté et lui proposer des prestations d'accompagnement permettant de développer son projet professionnel,
- souscrire pour le compte du collaborateur porté une assurance de responsabilité civile professionnelle,
- souscrire une garantie financière pour garantir le paiement du collaborateur porté et le versement des cotisations sociales (l'identité du garant financier doit figurer dans le contrat de prestation de portage salarial).
L'embauche peut se faire dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée(CDD) (nouveau motif légal de recours à ce type de contrat) ou d'un contrat à durée indéterminée (CDI) conclu entre le collaborateur porté et la société de portage salarial.
En matière de rémunération, l'entreprise de portage doit verser au collaborateur:
- une rémunération minimale égale à 75 % du plafond mensuel de la sécurité sociale (soit 2 414 euros par mois en 2016) pour une activité à temps plein,
- une indemnité d'apport d'affaire de 5 % de la rémunération.
Les périodes sans prestation à une entreprise cliente ne sont pas rémunérées.
Des règles spécifiques sont également prévues pour décompter l'ancienneté des collaborateurs portés dans l'entreprise de portage, notamment en matière d'éligibilité ou d'électorat ou encore d'épargne salariale.
L'entreprise cliente, quant à elle, ne peut avoir recours à un collaborateur porté que pour l'exécution d'une tâche occasionnelle ne relevant pas de son activité normale et permanente ou pour une prestation ponctuelle nécessitant une expertise dont elle ne dispose pas. L'ordonnance donne aux représentants du personnel de l'entreprise cliente les moyens de contester le recours abusif au portage salarial.
La durée de la prestation ne peut pas excéder 36 mois.
Avec ce nouveau motif de recours au CDD qui est caractérisé par le simple fait d'être porté ainsi que le CDI en portage et la très grande souplesse de ce dispositif, on comprend mieux l'énorme engouement qu'il suscite actuellement en particulier en Région Parisienne et dans les principales métropoles régionales. On constate déjà que des sociétés de portage commencent à se spécialiser très significativement par métier comme FINAXIM (DAF, DRH, DSI...). Coté salariés la formule semble aussi beaucoup attirante que le groupement d'employeurs dont la visibilité est jugée trop faible sur les emplois qualifiés.
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