Bercy renonce à ramener de 1,6 à 1,5 SMIC le point de sortie des allègements de charges patronales. Mais les allègements vont être calculés sur une base plus large, intégrant la participation et l'intéressement.
En annonçant un coup de rabot de plus de 3 milliards d'euros sur les allègements généraux de charges patronales (sur un total d'environ 20 milliards), le Parti socialiste s'est avancé fin janvier sur un terrain extrêmement glissant : alors que 12.000 emplois ont été supprimés au deuxième trimestre, son projet est susceptible de détruire encore des dizaines de milliers de postes. Paradoxalement, il s'attaque à l'un des meilleurs leviers contre le chômage et l'une des niches sociales présentant la plus grande efficacité économique, l'Inspection des finances l'ayant crédité de la note maximale de 3 sur 3 il y a tout juste un an.Quitte à compliquer encore un peu plus l'équation budgétaire de septembre, le gouvernement préfère donc revoir sa copie. Celle-ci comprenait une première mesure qui revenait à réserver les allègements de charges aux salaires compris entre 1 et 1,5 SMIC, contre 1,6 SMIC actuellement. Elle devait rapporter 2,3 milliards d'euros en année pleine. Mais, sauf surprise, le gouvernement y a finalement renoncé. La mesure, qui devait contribuer à financer les nouveaux projets du quinquennat (contrats de génération, aides à l'industrie, baisse de l'impôt sur les sociétés, etc.), devra donc être compensée par une autre. A en croire l'Inspection des finances, elle aurait eu un effet catastrophique sur l'emploi. Elle aurait provoqué la destruction de 40.000 postes, selon un rapport commandé par la majorité précédente. Elle aurait pénalisé davantage l'industrie que les services, où les salaires sont plus concentrés dans la zone de 1 à 1,3 SMIC. Elle aurait donc touché, en premier lieu, les activités soumises à la concurrence internationale, et notamment les industries automobile, chimique et électronique, souligne le rapport. La mesure aurait, en outre, rapporté près de deux fois moins que ce qu'espérait la gauche. Outre que les allègements de charges entre 1,5 et 1,6 SMIC ne représentent qu'une toute petite partie de la facture, les destructions d'emplois auraient représenté autant de cotisations en moins pour la Sécurité sociale. La mesure aurait par ailleurs porté un sérieux coup à la confiance des entreprises. Il serait en effet « peu crédible » de penser que cette réforme serait la dernière et que le nouveau point de sortie serait pérenne, estime l'auteur du rapport, Jean-Luc Tavernier. Dès lors, beaucoup de chefs d'entreprise auraient renoncé à conclure de nouveaux CDI, selon lui.
Au-delà des effets négatifs sur l'emploi, la mesure aurait alourdi le coût du travail non qualifié et augmenté le risque de trappe à bas salaires, insiste l'Inspection des finances. « Il existe de nombreuses mesures d'économies dont le gain budgétaire par rapport aux pertes d'emplois est bien meilleur », avait conclu l'IGF. A défaut de soutenir un tel choix, elle préconisait d'intégrer au calcul des allègements de charges les primes et les 13 es mois. Un projet qui a d'ailleurs été mis en oeuvre l'an dernier et qui rapporte près de 2 milliards d'euros par an aux comptes publics. Le projet socialiste prévoyait une deuxième mesure qui reste, elle, toujours d'actualité. Elle devrait figurer dans la loi de financement de la Sécurité sociale fin septembre : il s'agit d'étendre le champ des revenus pris en compte dans le calcul des allègements de charges, ce qui va fortement réduire leur montant. Aujourd'hui, ceux-ci sont accordés sur la base des salaires, ainsi que des primes, des 13 es mois et des avantages en nature. Mais les sommes versées au titre de la participation, de l'intéressement, des actions gratuites et des prestations complémentaires de retraite ne sont pas prises en compte. Le gouvernement souhaite que le point de sortie de 1,6 SMIC soit considéré sur la base de la rémunération complète, intégrant l'ensemble de ces revenus. .L'Inspection des finances n'est guère plus enthousiaste sur cette mesure que sur la première : à partir du moment où ces revenus sont exonérés de charges patronales -ce qui est toutefois de moins en moins le cas -, il est « peu intuitif » de les prendre en compte dans les allègements de charges. C'est pourtant bien l'intention du gouvernement.
Commentaire CR :
Pour les groupements d'employeurs, l'élargissement de l'assiette à l'intéressement et la participation va rendre l'équation de leur équilibre budgétaire d'une inouïe complexité.
Il convient en effet de rappeler que depuis la Loi Cherpion, les groupements doivent garantir l'égalité de traitement en matière de rémunération, d'intéressement, de participation et d'épargne salariale entre le salarié du groupement et les salariés des entreprises auprès desquelles, il est mis à disposition.
Cette égalité de traitement, revendiquée par l'UGEF pendant plusieurs années devient hélas une fausse bonne idée :
- l'intéressement et la participation perdent désormais l'essentiel de leur attrait à savoir l'exonération de charges patronales. En effet, ces sommes sont désormées taxées à 20%, soit plus le total de toutes les charges patronales pour un salarié au SMIC, et n'apportent par contre aucun droit au salarié (retraite, assedic,...) qui paie néanmoins la CSG sur ces sommes. Pire, elle augmentent seniblement les cotisations sociales avec cette nouvelle formule de l'exonération Fillon
- il manque toujours une circulaire pour expliquer concrètement aux groupements d'employeurs comment ils doivent s'y prendre pour calculer et verser les primes d'intéressement, la particpation et l'abondement au PEE ou au PERCO. De ce fait, chaque groupement y va de sa méthode dans la plus parfaite insécurité juridique.
- les groupements d'employeurs se trouvent en première ligne de responsabilité s'ils ne respectent pas cette égalité de traitement alors qu'ils ne disposent d'aucun moyen pour contraindre leurs adhérents à leur déclarer les sommes dues aux salariés mis à disposition
- A chaque fois que le groupement versera de l'intéressement ou de la participation à l'un de ses salariés c'est toute l'exonération Fillon annuelle de ce dernier qui sera revue à la baisse, mettant ainsi en péril les équilibres budgétaires
La solution pour sortir de ce capharnaüm serait de faire porter l'obligation égalité de traitement en matière d'intéressement, de participation et d'épargne salariale sur les seuls adhérents qui verseraient ainsi directement les sommes dues aux salariés du bénéficiaire du groupement d'employeurs.
Pour autant cela ne règle pas le sort de l'intéressement ou de l'abondement aux PEE qui étaient des atouts majeurs de la politique sociale de bon nombre de PME et qui perd désormais pratiquement tout intérêt.
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