La situation
n’est pas nouvelle car il y a déjà plusieurs années que des groupements
d’employeurs « non dénommés GEIQ » organisant des parcours d’insertion et de
qualification étaient conventionnés par les Direccte et perçoivent notamment l’aide
de 686 euros par
personne et par an pour chaque contrat de professionnalisation concernant des
personnes de moins de 26 ans et de plus de 45 ans.
Ces quelques agréments
résultaient d’une analyse juridique exposée au § I.
Beaucoup de groupements
d’employeurs font de l’insertion et de la formation qualifiante
dans des conditions très proches des seuls groupements dénommés GEIQ. Mais la plupart de ces
groupements ne faisaient pas la demande de conventionnement, bien souvent du
simple fait que les crédits disponibles n’étaient déjà pas suffisants pour servir
les seuls groupements dénommés GEIQ.
Ce qui est nouveau est que des GEIQ non adhérents à l'ancien CNCE-GEIQ sont désormais aussi conventionnés par les Direccte, comme par exemple le GEIQ AGROLOGIS, le GEIQ VERT, le GEIQ VIVIA ou les GEIQ GEMLOG pour en citer quelques uns.
Cette évolution résulte aussi de la Loi nouvelle exposée en § II.
Cette évolution résulte aussi de la Loi nouvelle exposée en § II.
Pour rappel, les dispositifs d’aides à ces groupements
d’employeurs sont définis :
- à l’article L. 6325-17 du Code du travail
(exonération cotisations accidents du travail au profit soit de
jeunes âgés de 16 à 25 ans révolus sortis du système scolaire sans
qualification ou rencontrant des difficultés particulières d'accès à l'emploi,
soit de demandeurs d'emploi âgés de 45 ans et plus)
- à l’article L. 5134-111 du Code du travail (emploi
d’avenir)
-de l'aide à l'insertion professionnelle au
titre d'un CIE (article. L. 5134-66 du Code du travail) ;
1. Les
groupements d’employeurs définis comme GEIQ avant la loi du 5 mars 2014.
Étaient bénéficiaires de ces mesures ou aides,
« les groupements d’employeurs qui organisent des parcours d’insertion et
de qualification ». Or, les textes n’avaient pas défini juridiquement cette
notion.
Toujours est-il que le label « GEIQ » ne
donnait de la part de l’Etat, aucun droit spécifique s’agissant des aides
susvisées. C’est d’ailleurs ce qu’ont rappelé les parlementaires dans l’exposé de l’amendement portant sur la Loi du 5 mars 2014.
Le fait que la procédure de labellisation ait été
reconnue par un décret (décret n°2009-1410 du 17 novembre 2009) ne permettait
pas de reconnaître aux GEIQ un statut juridique différent des autres
groupements d’employeurs visés à l’article L. 1253-1 du Code du travail. En
effet, cette labellisation n’était pas délivrée par une autorité administrative
ou une structure indépendante comme l'AFNOR. Ainsi, l’Etat et les autorités administratives
ne pouvaient leur réserver certaines mesures ou aides particulières.
En conséquence, un groupement d’employeurs remplissant les conditions posées par les textes pouvait
bénéficier de l’Etat, au même titre qu’un groupement labellisé, des aides
ou mesures susvisées (En ce sens : Les groupements d’employeurs
qui organisent des parcours d’insertion et de qualification – une nouvelle
catégorie juridique de groupement d’employeurs par Monsieur Pierre FADEUILHE,
semaine juridique social n°50, 11 décembre 2012, 1528).
Le refus d’aides opposé,
avant la loi du 5 mars 2014, à un groupement d’employeurs par une collectivité
territoriale, par l’Etat ou par un OPCA, au seul motif qu’il n’est
pas « labellisé GEIQ» (et non pas en raison de
l’insuffisance du « parcours d’insertion et de qualification ») apparaissait donc illégal et de nature à engager la responsabilité de la personne publique ou
de l’institution ayant refusé l’aide considérée.
Néanmoins, ces dispositions ont
été récemment modifiées par la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la
formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale.
2. Les
GEIQ après la loi du 5 mars 2014.
Alors que les dispositions antérieures ne
mentionnaient pas le terme « groupement d’employeurs pour l’insertion et
la qualification », désormais cette notion fait sont apparition de manière
expresse au sein du Code du travail.
Dès lors que le terme
« GEIQ » est désormais clairement inséré au sein du Code du travail,
il convient de vérifier ce que cette acception recoupe, et si pour se voir
qualifié de « GEIQ » un groupement d’employeurs doit être labellisé.
A. Sur
la définition des « GEIQ » visés par la loi du 5 mars 2014.
L’article L. 1253-1 du Code du travail relatif aux
groupements d’employeurs a été aussi modifié avec l’insertion de cet alinéa :
« ….Les groupements qui organisent des parcours d'insertion et de
qualification pour les salariés rencontrant des difficultés d'insertion qu'ils
mettent à la disposition de leurs membres peuvent être reconnus comme des groupements d'employeurs pour l'insertion
et la qualification dans des conditions fixées par décret….»
Ce nouvel alinéa de l’article 1253-1 a été ajouté
suite à un amendement discuté le 3 février 2014.
Il était alors exposé que :
« Le potentiel des
groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification (GEIQ) en matière
d’insertion et de qualification doit être encouragé.
A cet effet, cet amendement vise à
reconnaître la spécificité de certains groupements d’employeurs qui organisent
des parcours d’insertion et de qualification et à préciser qu’ils peuvent
bénéficier d’une reconnaissance en tant que GEIQ dans des conditions fixées par
décret.
Actuellement, l’appellation GEIQ
s’applique à des groupements d’employeurs labellisés par le CNCE (Comité
national de coordination et d’évaluation) – GEIQ mais ne donne accès en
soit à aucun droits spécifiques.
L’amendement fait expressément de
cette labellisation une condition d’accès à des droits ou des aides aujourd’hui destinées aux « groupements d’employeurs organisant des parcours
d’insertion et de qualification ». Cela impliquera une évolution
réglementaire du processus d’attribution du label dans lequel la place des
pouvoirs publics sera renforcée et les critères réajustés par voie
réglementaire, dans un fonctionnement proche de celui qui existe pour les
écoles de la deuxième chance.
Cela permettra de donner un socle
sécurisé au développement des GEIQ tout en améliorant leur suivi, leur
visibilité et leur reconnaissance. »
En conclusion, les GEIQ ont
désormais une existence légale et ne constituent plus uniquement un
« label » délivré par une association composée de GEIQ ou de groupements d'employeurs.
Désormais, tout groupement reconnu GEIQ pourra bénéficier
des aides indiquées en introduction. Ce sont, bien entendu, les services de
l’Etat qui sont seuls juges de cette qualification.
B. Du
décret d’application ressortira la définition des GEIQ
Néanmoins, pour l’instant, les
critères d’identification des GEIQ ne sont pas encore définis. Un décret
doit intervenir sur ce point. Mais ce dernier est attendu depuis bientôt 8 mois
et a priori aucun projet n’est rédigé à ce jour.
Or, les décrets doivent être pris légalement
dans un délai maximal de six mois. Le respect de ce délai implique que ces
textes soient conçus, dans la mesure du possible, en même temps que le projet
lui-même. Ce n’est hélas pas ce qui s’est passé s’agissant des GEIQ.
Il convient de rappeler que la
responsabilité de l'État peut être engagée du fait de la non-intervention des
décrets d'application dans un délai raisonnable (CE, Ass., 27 novembre 1964,
Veuve Renard, Rec. p. 590). Le Conseil d'État a une conception stricte du délai
raisonnable (voir pour un délai inférieur à un an, CE, 27 juillet 2005, Association Bretagne Ateliers, n°
261694). Les annulations de refus de prendre ces mesures peuvent être assorties
d'injonctions et d'astreintes (CE, Ass., 28 mars 1997, UNAF, n° 180943 ). Des
groupements d’employeurs qui se verraient refuser le qualification de GEIQ, du
fait de l’absence de ce décret les définissant, pourraient donc dès à présent
poursuivre l’Etat au fins d’obtenir réparation des aides non perçues.
Pour autant, malgré ces règles a
priori strictes, des centaines de Lois sont toujours dans l’attente de la
publication de décrets pour les rendre applicables comme l’a dénoncé le Sénat dans un récent rapport. Ainsi sur les 102 lois
promulguées au cours des années parlementaires 1997-1998 à 2008-2009, 43 lois
n'ont toujours pas été pleinement mises en application par absence de publication
des textes réglementaires y afférent.
Dans l’attente de ce Décret,
il n’est pas possible de se référer aux anciens textes, qui ne sont nullement
visés par la Loi nouvelle et dont l’application se révélait déjà délicate. C’est
la conclusion à laquelle les services de l’Etat se sont rangés et qui analysent
désormais les situations au cas par cas dans un environnement juridique on ne peut plus flou.
En conclusion, on comprend
l’importance que va revêtir ce décret pour tous les groupements d'employeurs qui organisent des parcours d’insertion et de qualification vers des
publics en réelle difficulté (... et pas des ingénieurs ou des Masters comme le font certains GEIQ...)
La situation la plus périlleuse
serait bien entendu celle de la non-publication du décret attendu. Ce ne serait hélas pas une
première et c’est malheureusement à ce jour le scénario le plus vraisemblable. A moins que l'UGEF ne profite de son prochain RDV avec le Ministère du Travail pour tenter de régler le problème.
Les groupements d'employeurs, dans leur globalité, peuvent faire beaucoup plus pour l'insertion et la qualification et il est donc très important en cette période de crise et de chômage, qu'ils se mobilisent tous pour que le gouvernement fassent paraître ce décret très rapidement, avec l'ambition d’accompagner le plus grand nombre de personnes en difficulté, en s'appuyant sur l'ensemble groupements d'employeurs français qui veulent agir en ce sens, avec créativité et efficacité.